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Photo du rédacteurFlorent A.

Décret tertiaire : qu'est-ce que c'est et qui est concerné ?

Dernière mise à jour : 25 nov. 2024

Les décennies à venir sont désormais cruciales pour tenter de contenir le réchauffement climatique en diminuant les émissions de gaz à effet de serre. Après les réflexions sur les transports et les process industriels, le poids de l’immobilier dans le bilan carbone global du pays est également en question. En France, le secteur du bâtiment représente 43 % des consommations énergétiques annuelles et génère près de 23 % des émissions de gaz à effet de serre.


Si de nombreuses mesures sont d’ores et déjà prises pour favoriser la rénovation énergétique de l’habitat, les bâtiments abritant des bureaux, des commerces ou des services font quant à eux l’objet d’un dispositif spécifique : le décret tertiaire.


Quelle est l'origine du décret tertiaire ?


La loi sur la transition énergétique


En 2015, la loi sur la Transition énergétique et pour la croissance verte (LTECV), le plus souvent abrégée en « loi de Transition énergétique », comporte de nombreuses dispositions en faveur d’une réduction de la facture énergétique du pays, de l’utilisation des énergies nouvelles, de l’économie circulaire et d’une amélioration de la gestion des déchets. L’article 17 de la loi, qui porte sur l’efficacité énergétique des bâtiments à usage tertiaire, prévoit des obligations d’amélioration de la performance énergétique des parcs immobiliers destinées aux activités de commerce et de services, avec pour objectif une réduction de 60% des consommations énergétiques dans le tertiaire à horizon 2050. Des objectifs intermédiaires doivent être fixés par décret. Du fait de la tardiveté de sa publication (2017), le premier décret de rénovation tertiaire fixant un objectif de diminution des consommations énergétiques de 25 % pour 2020 sera suspendu par le Conseil d’État.


La loi ELAN


En 2018, la loi Évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (ELAN) reprend les grands principes de la loi sur la Transition énergétique au sujet du parc tertiaire. Elle maintient notamment l’objectif de réduction de 60 % de la consommation énergétique à l’horizon 2050, mais fixe deux nouveaux objectifs intermédiaires : la réduction de 40% des consommations des bâtiments tertiaires d’ici 2030 puis de 50% d'ici 2040. C’est ainsi dans le cadre de la loi ELAN qu’est publié le décret n°2019-771, dit « décret tertiaire ». Celui-ci détaille les actions et obligations fixées par l’article 175 du chapitre II « Rénovation énergétique ».





Quels sont les objectifs du décret tertiaire ?


La loi ELAN inscrit l’obligation de réduction de la consommation énergétique des bâtiments tertiaires au Code de la construction et de l’habitation. Le décret tertiaire, quant à lui, précise les conditions d’application de la mesure à travers la mise en place du Dispositif Éco Énergie Tertiaire : une obligation réglementaire qui engage les acteurs du secteur tertiaire dans la sobriété énergétique en imposant une réduction de leur consommation d’énergie. Le dispositif prévoit une obligation d’actions visant à la réduction des consommations d’énergie et une obligation de déclaration des consommations annuelles et des résultats des actions mises en place. Les déclarations doivent être réalisées sur la plateforme OPERAT (l'Observatoire de la performance énergétique de la rénovation et des actions du tertiaire), gérée par l’ADEME (l'Agence de l'Environnement et de la Maîtrise de l'Énergie).


Le décret tertiaire offre aux entreprises assujetties deux méthodes alternatives pour atteindre les objectifs de réduction de la consommation énergétique. Les entreprises doivent choisir l'une de ces deux approches :

  • Méthode en valeur relative (Crelat) : cette approche consiste à réduire la consommation d'énergie finale en pourcentage par rapport à une année de référence choisie entre 2010 et 2022. Les objectifs de réduction sont fixés à 40 % d'ici 2030, 50 % d'ici 2040 et 60 % d'ici 2050.

  • Méthode en valeur absolue (Cabs) : cette méthode vise à atteindre un niveau d'énergie finale fixé (en kWh/m²/an) en fonction de la catégorie d'activité du bâtiment. Chaque secteur d'activité a ses propres seuils à respecter.


La loi ELAN et le décret tertiaire qui en est issu concernent les bâtiments existants. Les obligations qui concernent les constructions neuves sont fixées par la réglementation environnementale RE2020, qui encadre la transformation progressive des techniques de construction et des solutions énergétiques.



Quelles sont les entreprises concernées par le décret tertiaire ?


Le décret tertiaire concerne les propriétaires et exploitants d’établissements abritant les activités tertiaires du secteur privé ou du secteur public, dont les bâtiments présentent une surface d’au moins 1000 m2. Le secteur tertiaire regroupe toutes les activités non agricoles (secteur primaire) et non industrielles (secteur secondaire). Sont donc concernées par le Dispositif Éco Énergie Tertiaire des entreprises aux champs d’activités variés : bureaux, enseignement, santé, commerces, justice, hôtellerie, informatique, stationnement, etc.


Les lieux de culte, constructions provisoires, bâtiments de défense, de sécurité civile ou de sécurité intérieure du territoire ne sont pour leur part pas concernés par ce décret.


En mars 2024, plusieurs nouvelles catégories d'activités ont été ajoutées au champ d'application du décret. Parmi celles-ci figurent les blanchisseries industrielles, la logistique de température ambiante, les centres hospitaliers, les établissements pénitentiaires, les établissements médico-sociaux, le secteur de la protection judiciaire de la jeunesse, et les centres sportifs.



Décret tertiaire : quelles sont les sanctions encourues ?


En cas de manquement à l’obligation de transmission des informations sur la plateforme OPERAT, les assujettis reçoivent une mise en demeure de procéder à la déclaration dans un délai de 3 mois. À défaut de déclaration sous ce délai, l’identité de l’entreprise défaillante sera rendue publique par l’État, suivant le principe de « name and shame ».


Si les objectifs de réduction ne sont pas atteints, le propriétaire ou locataire du bâtiment tertiaire dispose de 6 mois pour produire un nouveau plan d’action permettant de réduire ses consommations énergétiques. À défaut, une seconde mise en demeure précèdera la publication du nom de l’assujetti par l’État, puis l’éventuelle application d’une amende administrative (de 1500 à 7500 euros selon le statut juridique).



Quelle stratégie et quelles actions mettre en place dans son entreprise dans le cadre du décret tertiaire ?


Le décret tertiaire précise différents leviers d’action pour permettre aux acteurs du tertiaire d’atteindre leurs objectifs :

  • La rénovation énergétique des bâtiments incluant des travaux d’isolation, le changement des menuiseries ou la mise en place de protections solaires

  • L’installation d’équipements performants de chauffage, de refroidissement, d’éclairage, et d’eau chaude

  • La mise en place de dispositifs de contrôle et de gestion active des équipements dans le cadre d’un système global de GTB (Gestion Technique du Bâtiment), rendue obligatoire en 2020 par le décret BACS pour les bâtiments tertiaires équipés d’un système de climatisation ou de chauffage d’une puissance supérieure à 290 kW

  • L’optimisation de l’exploitation des équipements de chauffage et de climatisation, à travers des contrats d’exploitation qui intègrent les objectifs de résultats en matière de réduction des consommations d’énergie, et à travers un suivi rigoureux de la gestion des équipements.

  • L’adaptation des locaux tertiaires à des usages moins énergivores : éclairages adaptés aux postes de travail, systèmes d’extinction automatique des lumières après la fermeture, sensibilisation des occupants aux comportements éco-responsables (notamment en matière de sobriété numérique).



Le décret tertiaire face aux exigences renforcées de l'Union Européenne


La nouvelle directive européenne sur la performance énergétique des bâtiments, adoptée en 2024, impose des réformes significatives visant à améliorer l'efficacité énergétique du parc immobilier tertiaire et public. En ligne avec le Pacte vert pour l'Europe, cette directive exige que 16 % des bâtiments les moins performants soient rénovés d'ici 2030, avec une extension à 26 % d'ici 2033.


Contrairement au décret tertiaire français, qui ne s'applique qu'aux bâtiments de plus de 1000 m², la directive européenne ne fixe pas de seuil minimal de surface, ce qui pourrait nécessiter des ajustements réglementaires en France pour inclure les bâtiments plus petits. Les États membres doivent transposer ces exigences dans leur législation nationale d'ici mai 2026.



Conclusion


Comme pour la réalisation d’un bilan carbone, un accompagnement par une agence experte et accréditée permet de répondre plus facilement aux enjeux du décret tertiaire. Avec la réalisation d’un audit énergétique, la construction d’une stratégie, la mise en place d’actions et un suivi des consommations, la mise en application du décret tertiaire représente aussi des opportunités pour les entreprises ou les parcs immobilier : en matière d’économies d’énergie d’abord, mais aussi de valorisation du bien et d’amélioration du confort de ses usagers.

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